Philippe Deniel, La Vindicte du Corbeau

Résumé : La Vindicte du Corbeau
1780 : une mystérieuse race extraterrestre, les Dryades, propose à Louis XVI un pacte qu’il ne peut refuser, faisant de la France la première puissance du Vieux Monde.
1815 : Thierry de Chambreuil, capitaine du corps des Mousquetaires Noirs se voit proposé par l’ambassadeur Cérès une mission d’apparence anodine, mais qui pourrait bien fragiliser les relations entre le royaume et ses alliées d’outremonde. Il ignore que des agents du traître Lafayette, le dirigeant des renégats de Nouvelle France, ont traversé l’océan. Avec l’aide de la magie ancestrale des Hurons, et des redoutables créatures qui les accompagnent, ils ont ourdi un terrible complot qui pourrait abattre la plus grande monarchie européenne.
Assisté par Dame Thalie, la Dryade rebelle, Thierry de Chambreuil saura-t-il triompher de la Vindicte du Corbeau et découvrir la vérité qui se dissimule dans l’ombre ?


La Vindicte du Corbeau est une uchronie sfiste de Philippe Deniel dans laquelle les Sylvidres d’Albator débarquent dans la France de Lady Oscar, ou dans laquelle les Taelons d’Invasion Planète Terre débarquent dans la France de Nicolas Le Floch… pour un résultat qui ressemble pas mal au cycle sailpunk de l’auteur cajun Greg Keyes intitulé L'Âge de la déraison ou aux expériences littéraires de Johan Heliot qui a fait débarquer les aliens dans la France de Napoléon III avant de les faire débarquer dans la France de Louis XIV ! Avec leur extraordinaire maîtrise du vivant les extraterrestres végétaux ont mis fin à la crise agricole donc économique et sociale des années 1780, et la Révolution Française n’a finalement jamais eut lieu… Mais l’auteur part de l’idée que Louis XVI a quand même convoqué les États Généraux pour transformer la monarchie absolue en monarchie parlementaire avant de se lancer dans un conquête qui s’est conclut dans la terrible Bataille de Londres. C’est ainsi que Louis XVI règne sur la France grâce aux Mousquetaires Noirs (des cyborgs biopunks), que la France règne sur l’Europe grâce aux armes biotechnologiques fournies par alliés aliens et que dissidents conservateurs ou rebelles radicaux ont trouvé refuge outre-atlantique en en attendant l’heure de la revanche !
Louis XVI le Bien aimé meurt le 30 mars 1815, et la guerre de succession couve entre les deux fils du roi, l’un soutenu par le Premier Ministre Robespierre l’autre soutenu par le Premier Général Bonaparte, et c’est dans ce contexte qu’on suit les investigations du capitaine Thierry de Chambreuil, un Jack Bauer en dentelle qui avec son bras végétal fait équipe avec Thalie la dryade androgyne, les complots de son adversaire Nicolas de Favras qui lui fait équipe avec Tekoa le shaman huron (rebelles ou terroristes ?), et les mésaventures de la pauvresse Julie qui livrée à un nouveau Geoffrey Lannister remonte bien malgré elle la piste de leurs alliés traîtres au Royaume de France (remember Les Mystères de Paris) !

Et bien, c’était vraiment pas mal du tout ! L’univers uchronique est bien bien troussé, les bonnes idées ne manquent pas et sont bien mises en scènes avec une intrigue qui suit tous les cades du roman feuilleton de cape et épée. Mieux encore tout cela dispose de suffisamment de marche de manœuvre pour transformer un stand-alone en véritable serial (ou carrément en véritable feuilleton), et je serai ravi de retrouver ce monde imaginaire et ses personnages hauts en couleur…
Après je veux être force de proposition concernant l’avenir : il m’a semblé qu’on s’est un peu emmêlé les pinceaux entre Louis-Charles le Souffreteux et Louis Joseph le Batailleur (erreur de l’auteur ?) et entre Lisythéa et Lysithéa (erreur de l’éditeur ?), l’évolution de cette France uchronique m’a semblé être trop poussée pour ne pas avoir cédé quelques facilités, et malgré une structure en POVs la narration à la première personne de Thierry de Chambreuil vampirise le dramatis personae qui ne laisse plus guère de place aux personnages secondaires (d’autant plus qu’on cède à la tentation de placer moult célébrités dans un camp ou dans un autre, avec quelques « incohérences » car par exemple je vois mal Lafayette fidèle d’entre les fidèles de la famille royale passer à l’ennemi ou l’incorruptible Robespierre rallier la monarchie et s’adonner aux vils des games of thrones aristocratiques). C’est aussi dommage qu’avec un tel univers le récit reste quasiment cantonné à Paris et ses proches environs mêmes si ces derniers sont bien reconstitués… Pour finir l’illustration de couverture d’Axelle Bouet est d’autant plus réussie qu’elle est fidèle au récit, mais 15 euros pour un format assez proche du livre de poche ce n’est quand même pas donné d’autant plus que le récit fait moins de 300 pages : j’imagine bien les exigences et les contingences d’une Small Press, mais à ce compte-là une police d’écriture plus élevée et une mise en place plus aérée auraient pas été de refus ^^