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Brian Ruckley, Un Monde sans dieux
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Brian Ruckley, Un Monde sans dieux
Résumé du tome 1 :
Une trêve troublée s’est installée entre les thanes des lignées du vrai sang.
À présent qu’un nouvel hiver s’annonce, les armées de la Route Noire ont repris le chemin du sud, quittant les terres où elles furent exilées, au-delà du Val des Pierres. Pour certains, la guerre n’apportera qu’une mort rapide et violente. D’autres ne connaîtront jamais le tumulte des épées qui s’entrechoquent, ni les champs jonchés de cadavres. Pour ceux-là, la guerre n’est qu’un excellent moyen de favoriser leurs ambitions. Qu’ils se hâtent, car bientôt les ténèbres qui descendent sur le monde les engloutiront, comme les autres.
Car, tandis que la tempête des batailles fait rage, un homme s’engage sur un chemin solitaire, une voie qui éveillera un terrible pouvoir en lui. Son héritage sera un héritage de sang.
Au début je me disais que c'était entre le Sorceleur et les Royaumes d’Épines et d'Os.
J'ai vu que pas mal de gens avait identifié une formule Trône de Fer + Monarchies divines.
Et pendant pas mal de temps, c'est vrai que cela ressemble à un bon substitut au TdF : les guerres septentrionales, les intrigues méridionales, le chaos qui s'installe, les personnages qui s'en prennent plein la tronche...
Mais après lecture du tome 3, je dirais que c'est quelque part entre l'Assassin Royal et le Prince du Néant.
Effectivement dans la qualité d’écriture et le traitement des thèmes abordés, difficile de prendre l'auteur en défaut.
Écriture sobre par moment, intense en d'autres moments, et un vrai talent pour les scènes âpres et violentes avec des batailles qui se morcellent en escarmouches, en combats "individuels" pour sauver sa peau.
Mais autant le dire tout de suite, si c'est plein de qualités je n'ai pas vraiment accroché.
Punaise cela va être coton d'argumenter sans spoiler...
Beaucoup de bons éléments :
Avec son ambiance nordique, ses peuples maudits et ses conflits féodaux, on pourrait penser au très bon jdr suédois Gemini !
L'univers est intéressant, solide et bien construit avec ses lignées divisées par un schisme religieux et minées par de nombreuses et profondes rivalités internes.
On retrouve essentiellement une Écosse fantasmée avec une féodalité nettement plus achalandée qu'à l'accoutumée.
Malgré la présence des na'kyrims, des métisses psioniques stériles, on est plus dans une saga de low fantasy qu'autre chose.
(Depuis les Chroniques des Crépusculaires de Mathieu Gaborit, je rêve de lire un récit de fantasy avec des psioniques, mais une fois encore ce ne sera pas pour ce coup-là)
Comme dans le TdF une longue galerie de crevards carriéristes bouffis d'orgueil avec des aristocrates qui ne pensent qu'à gagner plus de pouvoir et des ploutocrates qui ne pensent qu'à gagner plus d'argent, tous pour encore mieux mépriser et écraser ceux qu'ils jugent inférieurs.
Comme dans le TdF une sacrée galerie de personnage féminins : Anyara, Ess'yr, Wain, Shraeve, Ilessa, Tara, Yvane, Eshenna, fichtre cela ne manque vraiment pas de forts caractères !
Foi, credo, prédestination, promesse d’un monde meilleur après la mort, ordre monastique, ordres militaires (les inkalims)...
... Pour un monde sans dieux, il est bel et bien présent le fait religieux !
Je ne sais pas si l'auteur vise la religion en général ou une confession en particulier...
... Mais dans les cas, il ne semble vraiment pas tendre envers ceux qui ont la « foi » !
Tous ces croyants qui au nom de leur religion se laissent pousser vers leurs bas instincts en semant la destruction et la chaos sur leur passage : la croisade inrithie de Scott Bakker a trouvé sa digne fille cachée !
Les kyrinins de Brian Ruckley ressemblent beaucoup aux elfes d'Andrzej Sapkowski, parfois sinon souvent racistes et vindicatifs comme les Scoia'tael : Harfang, Renard, Héron, Serpent, Faucon, Taureau, Cheval...
Tous ces clans elfiques nomades qui vivent comme les tribus amérindiennes nous offrent de très scènes belles d'actions forestières où on fuit, poursuit et combat à travers montagnes, combes et vallées...
Cela fait agréablement Dernier des Mohicans à niveau-là, et j'avoue que j'aimerais bien voir l'auteur aller dans cette voie à l'avenir.
Un prologue qui annonce la couleur, une mise en place avec un air de déjà-vu, mais ensuite j'ai vraiment été bien dedans. Toutefois plusieurs trucs ont fini par me lasser et j'ai fini par décrocher au début du 3ème tome.
Pourtant la fin était bien... mais cela faisait plusieurs centaines de page que j'étais passé en mode « aller, il faut vite en finir pour enfin passer à autre chose ».
Alors qu'est-ce qui n'a pas marché ?
C'est bien beau ces 1700 pages divisées en 3 pièces de 5 actes, mais il y avait quand même du remplissage avec des redondances :
- les portraits de personnages ou de paysages sont très réussis, pourtant une ambiance peine parfois à se dégager de l'ensemble (mais c'est nettement moins vrai sur la fin avec ce drame eschatologique qui amène donne une coloration crépusculaire à l'ensemble)
- au bout d'un moment c'était saoulant la description des émois d'Osirian (cette histoire de non-dit qui n'en finit plus ne m'a pas touché du tout), de la lente déchéance/décrépitude de celui par qui le chaos est arrivé, de l'attitude puante des aristocrates Haig, de l'attitude rigoriste des chefs Gyre et inkalim, et dans le 3ème tome
La structure en point of view n'est pas optimisée : c'est parfois un poil décousu avec ces points de vue assez inégaux, car on suit un personnage et ensuite il faut attendre 100 pages bien tassées sinon plus pour avancer dans son histoire, sans parler de points de vue très secondaires qui n'amènent pas grand chose (qu'ont amené Torquementine et plus encore Amen le Surin ?).
Cela aboutit à un éparpillement de l'intrigue qui hache le rythme voire la narration (Osirian au début, Anyara à la fin)...
Et J'ai eu un vrai problème avec l'empathie qu'on devrait avoir pour les protagonistes. :tss:
(Car quand on est arrivé à un point où on n'en a rien à carrer de l'issue des événements, impossible de s'enflammer.)
Je trouve que trop de personnage sont restés figés dans leur personnalité : aucune évolution de leur part
Gryvan et Ragnor sont ambitieux et orgueilleux, Aewult est un imbécile égocentrique, Shraeve la reine des Corbeaux est impitoyable, Kanin est constamment animé par une rage froide, Aeglyss le pauvre ne se sent pas aimé (il est détesté parce qu'il est détestable et puis tout), Roaric est plein de ressentiment et a envie d'en découdre, Varryn reste silencieux et lève un sourcil de désappointement...
Pas mal de personnages auraient pu être plus intéressants s’ils n’avaient pas disparu à un moment ou à un autre :
Et puis cela devient prévisible et cela finit cruellement par manquer de suspens :
- les « héros » subissent constamment les événements et semblent totalement prisonnier de leur enchaînement, ils ne font que fuir et ne trouvent que très rarement l'opportunité de réagir face aux nombreux malheurs qui les frappent
- les cliffhangers sont parfois annoncés longtemps à l'avance, et on au bout d'un certain temps on devine que d'une manière ou d'une autre cela va encore foirer et que les choses vont encore davantage empirer.
- l'agent du changement, et bien c'est juste un trou-du-cul nombriliste qui, comme tous ceux de son espèce qui accèdent au pouvoir, devient un sociopathe mégalomane... et avec encore plus de pouvoir il devient un psychopathe complètement taré...
Bref, pas trop de surprise le concernant !
En fait j'ai l'impression d'avoir lu 2 histoires avec l'une qui prend le pas sur l'autre quelque part dans le 2ème tome avec un twist qui me paraît être plus un deus ex machina qu'autre chose
En bref : c'est froid, sombre, désespéré sinon nihiliste...
Une saga intense donc, mais qui ne plaira pas à tout le monde loin s'en faut.
Une note ? 8/10
PS : j'ai enchaîné les 3 tomes en écoutant la BO des Piliers de la Terre, c'était très sympa à ce niveau là.
À présent qu’un nouvel hiver s’annonce, les armées de la Route Noire ont repris le chemin du sud, quittant les terres où elles furent exilées, au-delà du Val des Pierres. Pour certains, la guerre n’apportera qu’une mort rapide et violente. D’autres ne connaîtront jamais le tumulte des épées qui s’entrechoquent, ni les champs jonchés de cadavres. Pour ceux-là, la guerre n’est qu’un excellent moyen de favoriser leurs ambitions. Qu’ils se hâtent, car bientôt les ténèbres qui descendent sur le monde les engloutiront, comme les autres.
Car, tandis que la tempête des batailles fait rage, un homme s’engage sur un chemin solitaire, une voie qui éveillera un terrible pouvoir en lui. Son héritage sera un héritage de sang.
Au début je me disais que c'était entre le Sorceleur et les Royaumes d’Épines et d'Os.
J'ai vu que pas mal de gens avait identifié une formule Trône de Fer + Monarchies divines.
Et pendant pas mal de temps, c'est vrai que cela ressemble à un bon substitut au TdF : les guerres septentrionales, les intrigues méridionales, le chaos qui s'installe, les personnages qui s'en prennent plein la tronche...
Mais après lecture du tome 3, je dirais que c'est quelque part entre l'Assassin Royal et le Prince du Néant.
Effectivement dans la qualité d’écriture et le traitement des thèmes abordés, difficile de prendre l'auteur en défaut.
Écriture sobre par moment, intense en d'autres moments, et un vrai talent pour les scènes âpres et violentes avec des batailles qui se morcellent en escarmouches, en combats "individuels" pour sauver sa peau.
Mais autant le dire tout de suite, si c'est plein de qualités je n'ai pas vraiment accroché.
Punaise cela va être coton d'argumenter sans spoiler...
Beaucoup de bons éléments :
Avec son ambiance nordique, ses peuples maudits et ses conflits féodaux, on pourrait penser au très bon jdr suédois Gemini !
L'univers est intéressant, solide et bien construit avec ses lignées divisées par un schisme religieux et minées par de nombreuses et profondes rivalités internes.
On retrouve essentiellement une Écosse fantasmée avec une féodalité nettement plus achalandée qu'à l'accoutumée.
Malgré la présence des na'kyrims, des métisses psioniques stériles, on est plus dans une saga de low fantasy qu'autre chose.
(Depuis les Chroniques des Crépusculaires de Mathieu Gaborit, je rêve de lire un récit de fantasy avec des psioniques, mais une fois encore ce ne sera pas pour ce coup-là)
Comme dans le TdF une longue galerie de crevards carriéristes bouffis d'orgueil avec des aristocrates qui ne pensent qu'à gagner plus de pouvoir et des ploutocrates qui ne pensent qu'à gagner plus d'argent, tous pour encore mieux mépriser et écraser ceux qu'ils jugent inférieurs.
Comme dans le TdF une sacrée galerie de personnage féminins : Anyara, Ess'yr, Wain, Shraeve, Ilessa, Tara, Yvane, Eshenna, fichtre cela ne manque vraiment pas de forts caractères !
Foi, credo, prédestination, promesse d’un monde meilleur après la mort, ordre monastique, ordres militaires (les inkalims)...
... Pour un monde sans dieux, il est bel et bien présent le fait religieux !
Je ne sais pas si l'auteur vise la religion en général ou une confession en particulier...
... Mais dans les cas, il ne semble vraiment pas tendre envers ceux qui ont la « foi » !
Tous ces croyants qui au nom de leur religion se laissent pousser vers leurs bas instincts en semant la destruction et la chaos sur leur passage : la croisade inrithie de Scott Bakker a trouvé sa digne fille cachée !
Les kyrinins de Brian Ruckley ressemblent beaucoup aux elfes d'Andrzej Sapkowski, parfois sinon souvent racistes et vindicatifs comme les Scoia'tael : Harfang, Renard, Héron, Serpent, Faucon, Taureau, Cheval...
Tous ces clans elfiques nomades qui vivent comme les tribus amérindiennes nous offrent de très scènes belles d'actions forestières où on fuit, poursuit et combat à travers montagnes, combes et vallées...
Cela fait agréablement Dernier des Mohicans à niveau-là, et j'avoue que j'aimerais bien voir l'auteur aller dans cette voie à l'avenir.
Un prologue qui annonce la couleur, une mise en place avec un air de déjà-vu, mais ensuite j'ai vraiment été bien dedans. Toutefois plusieurs trucs ont fini par me lasser et j'ai fini par décrocher au début du 3ème tome.
Pourtant la fin était bien... mais cela faisait plusieurs centaines de page que j'étais passé en mode « aller, il faut vite en finir pour enfin passer à autre chose ».
Alors qu'est-ce qui n'a pas marché ?
C'est bien beau ces 1700 pages divisées en 3 pièces de 5 actes, mais il y avait quand même du remplissage avec des redondances :
- les portraits de personnages ou de paysages sont très réussis, pourtant une ambiance peine parfois à se dégager de l'ensemble (mais c'est nettement moins vrai sur la fin avec ce drame eschatologique qui amène donne une coloration crépusculaire à l'ensemble)
- au bout d'un moment c'était saoulant la description des émois d'Osirian (cette histoire de non-dit qui n'en finit plus ne m'a pas touché du tout), de la lente déchéance/décrépitude de celui par qui le chaos est arrivé, de l'attitude puante des aristocrates Haig, de l'attitude rigoriste des chefs Gyre et inkalim, et dans le 3ème tome
- :
- des scènes de folie sanguinaire qui se multiplient à l'infinie...
La structure en point of view n'est pas optimisée : c'est parfois un poil décousu avec ces points de vue assez inégaux, car on suit un personnage et ensuite il faut attendre 100 pages bien tassées sinon plus pour avancer dans son histoire, sans parler de points de vue très secondaires qui n'amènent pas grand chose (qu'ont amené Torquementine et plus encore Amen le Surin ?).
Cela aboutit à un éparpillement de l'intrigue qui hache le rythme voire la narration (Osirian au début, Anyara à la fin)...
Et J'ai eu un vrai problème avec l'empathie qu'on devrait avoir pour les protagonistes. :tss:
(Car quand on est arrivé à un point où on n'en a rien à carrer de l'issue des événements, impossible de s'enflammer.)
Je trouve que trop de personnage sont restés figés dans leur personnalité : aucune évolution de leur part
Gryvan et Ragnor sont ambitieux et orgueilleux, Aewult est un imbécile égocentrique, Shraeve la reine des Corbeaux est impitoyable, Kanin est constamment animé par une rage froide, Aeglyss le pauvre ne se sent pas aimé (il est détesté parce qu'il est détestable et puis tout), Roaric est plein de ressentiment et a envie d'en découdre, Varryn reste silencieux et lève un sourcil de désappointement...
Pas mal de personnages auraient pu être plus intéressants s’ils n’avaient pas disparu à un moment ou à un autre :
- :
- Kennet le dépressif, Leanor le sage, Inurain l'humaniste, Wain la vierge guerrière, Rothe le loyal garde-du corp, les Na'karym Cerys et Bannain qui auraient mérité plus de pages, Mordain et Tara d'un côté, Yvane et Eshanna d'un autre côté qui s'effacent complètement au cours du tome 3, Cannek se laisse exécuter, Theor se "suicide"...
- :
- Osirian, Taim, Kanin, Eska...
Et puis cela devient prévisible et cela finit cruellement par manquer de suspens :
- les « héros » subissent constamment les événements et semblent totalement prisonnier de leur enchaînement, ils ne font que fuir et ne trouvent que très rarement l'opportunité de réagir face aux nombreux malheurs qui les frappent
- les cliffhangers sont parfois annoncés longtemps à l'avance, et on au bout d'un certain temps on devine que d'une manière ou d'une autre cela va encore foirer et que les choses vont encore davantage empirer.
- l'agent du changement, et bien c'est juste un trou-du-cul nombriliste qui, comme tous ceux de son espèce qui accèdent au pouvoir, devient un sociopathe mégalomane... et avec encore plus de pouvoir il devient un psychopathe complètement taré...
Bref, pas trop de surprise le concernant !
En fait j'ai l'impression d'avoir lu 2 histoires avec l'une qui prend le pas sur l'autre quelque part dans le 2ème tome avec un twist qui me paraît être plus un deus ex machina qu'autre chose
- :
- (j'avais eu le même problème avec Le Sang des Ambrose où un récit d'héroïc fantasy se transformait en survival horror à la Sam Raimi... avec un sorcier taré pas si éloigné d'Aeglyss )
- si on avait voulu montrer comment la haine et la violence amène des gens normaux à rechercher la guerre et son cortège de calamités, comment les mœurs se brutalisent et les esprits s'aliènent, on aurait pu rester en low fantasy sans problème il y avait largement de quoi faire
- si on avait voulu élaborer un survival horror, on s'y serait pris autrement (chacun dans son style Resident Evil, Silent Hill et Dead Space y parviennent très bien sans une mise en place de plus de 1000 pages)
Là, on oppose sadiquement un persuasif surdoué qui se transfigure en un superpsionique semi-divin avant de plonger le monde au cœur de sa propre folie... à des prestidigitateurs de 2ème zone et des seconds couteaux qui ne peuvent absolument rien faire du tout !
En bref : c'est froid, sombre, désespéré sinon nihiliste...
Une saga intense donc, mais qui ne plaira pas à tout le monde loin s'en faut.
Une note ? 8/10
PS : j'ai enchaîné les 3 tomes en écoutant la BO des Piliers de la Terre, c'était très sympa à ce niveau là.
Albéric- Nécromancien
- Date d'inscription : 16/01/2012
Re: Brian Ruckley, Un Monde sans dieux
Merci pour la chronique !
Oncle Kiin- Tribun de la Pia fidelis
- Date d'inscription : 12/02/2013
Re: Brian Ruckley, Un Monde sans dieux
A ton service camarade.Oncle Kiin a écrit:Merci pour la chronique !
Albéric- Nécromancien
- Date d'inscription : 16/01/2012
Re: Brian Ruckley, Un Monde sans dieux
Une excellente note tout de même quand on lit ta chronique qui présente ce livre comme en demi-teinte tout de même!
JMtimba- Le Fléau des Démons
- Date d'inscription : 28/06/2007
Re: Brian Ruckley, Un Monde sans dieux
On est d'autant plus mitigé quand on n'a pas aimé qu'on a senti la qualité et les ingrédients bien mélangés. Pour une semi-déception, je ne cache pas que plein de trucs m'ont bien plu : je retrouverai donc l'auteur avec intérêt sinon plaisir.JMtimba a écrit:Une excellente note tout de même quand on lit ta chronique qui présente ce livre comme en demi-teinte tout de même!
Et je suis sûr que ce qui ne m'a pas touché plaira à beaucoup d'autres.
Albéric- Nécromancien
- Date d'inscription : 16/01/2012
Re: Brian Ruckley, Un Monde sans dieux
TOME I
Le moins que l'on puisse dire, c'est qu'un monde sans dieux est une trilogie particulièrement dense avec un style narratif qui tient plus à R. R. Martin qu'à David Gemmell. À ce titre le premier volume "un hiver de sang" est un pavé de près de 600 pages qui aurait très bien pu être scindé en deux volumes.
La lecture de ce premier tome me donne un sentiment contrasté, oscillant entre la satisfaction d'avoir découvert un monde d'une richesse et d'une diversité remarquable, une intrigue sophistiquée et évolutive, et la déception d'avoir parcouru une histoire ou plutôt des histoires, se complexifiant à l'infini tout en faisant intervenir des personnages toujours plus nombreux à chaque fois. Il en résulte une certaine lenteur scénaristique avec le choix d'un auteur se préférant à nous poser en tant que simple spectateur pour nous faire suivre tour à tour le destin des multiples personnages impliqués de près ou de loin dans la dramaturgie.
De ce fait il est assez difficile de s'impliquer émotionnellement dans le récit.
Je ne pourrai pas parler de déception tant le récit regorge de scènes mémorables et de personnages attachants ( le final ainsi que les épilogues sont pour le moins palpitants) mais je regrette que Brian RUCKLEY n'ait pas réussi à concevoir son récit d'une manière plus fluide et plus agréable à lire.
Si sur le fond, un hiver de sang est une énorme satisfaction, le vrai grand défaut de ce roman est le bien sa forme narrative qui le rend par moments très laborieux à suivre.
TOME II
Aussi surement que les vents du nord apportent les promesses d'un hiver long et douloureux, les premiers flocons portent avec eux un voile qui pare les terres d'un linceul blanc propice à ce que s'y écrivent en lettres de sang, le destin des lignées des hommes du nord.
Anduras, Kolglas autant de cités tombés sous la coupe des clans adorateurs de la route noire, et avec ces victoires portées par le murmure d'une brise glaciale, renaît un espoir, une ferveur.
En écho à ce chant hivernal, chaque jour apporte avec lui de nouvelles forces venant grossir une armée, un ogre à l'appétit de plus en plus insatiable.
Au sud, le temps n'est plus à se réjouir de ces petites escarmouches dont les ondulations pouvaient servir les manœuvres politiques du Thane des Thanes sur ses vassaux des lignées du vrai sang. La menace devient réelle, palpable, Gryvan Oc Haig se voit contraint d'y opposer finalement une armée de libération de dix mille âmes sur lesquels repose désormais l'avenir de tout un peuple.
Si pendant de longues années une paix précaire à vaicue entre les lignées du nord et celle du sud, aujourd'hui il ne reste plus que le souvenir d'un autre temps, d'un fantôme de paix.
Après un premier volume "un hiver de sang" très riche et prometteur mais assez poussif, Brian Ruckley passe à la vitesse supérieure et nous livre avec brio un récit emballant qui nous récompense finalement de notre persévérance.
L'action y est plus présente encore que dans le premier tome avec des scènes de bataille servant toujours très justement le récit, apportant avec elles une note poétique tout à fait louable.
Bien que le récit évolue en rebondissant par le point de vue de différents personnages dont l'auteur nous brosse savamment le portrait et les états d’âme, à l'inverse d'un hiver de sang la narration y gagne cette fois-ci en nous faisant vivre les événements selon des points de vue plus judicieux que dans le tome I.
Mention spéciale au personnage de Taim que l'auteur utilise pour nous permettre de vivre de l’intérieur le chaos de deux énormes batailles, avec à chaque fois une perception et une mise en situation originale et spectaculaire.
A noté que le personnage Aeglyss devient dans ce roman le personnage centrale de la dramaturgie en embrassant le rôle de menace ultime.
Droit du sang est un excellent roman de fantasy riche d'une intrigue complexe et subtile, avec des personnages d'une profondeur rare.
C'est un histoire sanglante, émouvante, dramatique, avec une fantasy plutôt réaliste où l'auteur entretient un suspense qui va crescendo servi par de multiples rebondissements et morts tragiques.
Incontestablement le tome III qui sortira prochainement, sera un événement de la rentrée prochaine à suivre de près.
TOME III
"Quand les hommes vouent un culte à la guerre et aux conflits,
quand ils font un temple de ses reliques,
quand ils prétendent apprendre des ruines d'hier comment ils doivent vivre leurs vies d'aujourd'hui,
alors ils se font eux-mêmes prisonniers du passé; ils se condamnent à revivre ces guerres, encore et encore.
Car il est peu de guerres que l'on puisse considérer comme véritablement et absolument révolues.
Toujours, la veine d'un éternel filon d'amertume court dans l'ame des hommes incapables de pardon, ou qui ne savent s’empêcher de creuser."
Alors que le monde s'écroule sur lui-même, que la folie et la rage n'habitent plus que le cœur des hommes, la fonte des neiges amorce un changement et esquisse les fondements d'une nouvelle ère. C'est le temps d'Aeglyss, autrefois un na'kyrim, aujourd'hui l'égal d'un dieu omnipotent ne faisant plus qu'un avec la source, l’énergie universelle régissant l'existence de ce monde.
C'est aussi un Dieu torturé, malade, dépressif, de ses états d’âme et autres rancœurs jaillissent des flots d’émotions qui corrompt le cœur de toutes formes de vie. C'est ainsi que les paysages enneigés laissent place à des champs de cadavres putréfiés éclairé par la pale luminosité d'un ciel cendré, alimenté par les milliers de foyers des hameaux et autres cités en proie aux flammes de la démence des hommes.
Sous l’égide de cette entité instable, mais doté d'un pouvoir infini de persuasion sur toute chose, nous n'assistons plus à une guerre rangée entre deux lignées, deux peuples, mais à un combat que se livre chaque homme face à sa bestialité, un combat opposant l'ordre au chaos, un combat fatalement perdu d'avance où les hommes semblent majoritairement prompt à embrasser leurs plus vils instincts.
Entre ceux qui succombent à la haine et les autres au désespoir, ne reste qu'une poignée d'insurgés comme le Thane Kanin Oc Horin-Gyre dont la haine envers Aeglyss semble insubmersible, et Orisian, le dernier Thanes de la lignée Lannis-Haig, qui secondé par Taim Narran et les Kyrinins du clan du renard, Ess'yr et Varryn, entend bien tenter le tout pour le tout en exploitant ce qui apparaît comme la dernière faiblesse du Na'kyrim.
Dans ce dernier volet d'un monde sans dieux, Brian Ruckley clos en apothéose sa trilogie et livre incontestablement un bel exercice de dark fantasy où l'auteur nous aura conquis par un style d’écriture alliant une belle fluidité et une grande richesse narrative. Le ton est définitivement plus noir et pessimiste, assez rapidement nous prenons la mesure d'un dénouement, qui s'il se laisse entrevoir plusieurs chapitres à l'avance, ne laisse pas indifférent. A l'inverse nous en espérons même une issue plus joyeuse tant l'auteur ne semble pas vouloir faire de concessions à ses personnages.
Les scènes d'action sont nombreuses avec certes un caractère moins épique et grandiose que dans le volume précédent, mais avec une sauvagerie et une barbarie allant crescendo.
Dans ce final Orisian gagne en épaisseur, l'auteur finit par lui consacrer toute son attention pour nous l'amener progressivement vers la conclusion de cette saga qui n'a pas grand chose à envier à d'autres grands cycles littéraires bénéficiant d'une plus grande notoriété.
"Ton sort est venu, habitant du pays;
le temps vient, le jour est proche! Du tumulte!...
et non le cri de joie sur les montagnes.
Maintenant, je vais sans tarder répandre mon courroux sur toi;
j'assouvirai sur toi ma colère, je te jugerai selon tes voies,
et je ferai retomber sur toi toutes tes abominations.
Mon oeil n'épargnera pas, et je serai sans pitié;
je ferai retomber sur toi tes œuvres, tes abominations seront au milieu de, toi;
et vous saurez que c'est moi, Yahweh, qui frappe!"
Livre d’Ezechiel chapitre 7
Un monde sans dieux est un cycle ambitieux pour un premier exercice d'auteur, et bien qu'il soufre d'un déficit de rythme et de fluidité dans le premier volume, Brian Ruckley réussit sur la longueur à créer un monde et une dramaturgie d'une belle richesse, le tout avec une grande virtuosité scénaristique. En adoptant un ton réellement pessimiste et dramatique, l'auteur insuffle à cette épopée une aura particulière, en quelque sorte une forme de romantisme mélancolique pour développer un récit qui s'apparente sur bien des aspects à un jugement dernier avec en toile de fond de belles réflexions philosophiques sur nos sociétés actuelles et leurs contradictions.
Un monde sans dieux est incontestablement une oeuvre à découvrir pour tous les amoureux des grandes fresques à l’atmosphère cruel et désabusé.
http://avalonfantasyforum.bbfr.net/f31-un-monde-sans-dieux
Marv- Le Fléau des Démons
- Date d'inscription : 18/04/2014
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